Orchestr­er la réal­ité :
la méth­ode doc­u­men­taire
de Rob Rombout

Télécharg­er le PDF

L’interrogation pre­mière soulevée par l’image pho­tographique, et par exten­sion par l’image en mou­ve­ment aux visées doc­u­men­taires, est celle de son rap­port à la réal­ité. Aus­si, un par­ti pris, quant à la con­cep­tion de la réal­ité, paraît incon­tourn­able dans le tra­vail du doc­u­men­tariste. Il déter­mine la rela­tion qui s’établit à tra­vers le film entre les images et le réel, autant pour le réal­isa­teur que pour les spec­ta­teurs. Au cours de l’histoire du doc­u­men­taire, plusieurs solu­tions ont été adop­tées. Celle pro­posée par Rob Rom­bout réfute, à la suite de Bertholt Brecht, la suff­i­sance du car­ac­tère indi­ci­aire [1] de l’image pho­tographique, et donc filmique, vis-à-vis du réel c’est-à-dire la qua­si équiv­a­lence de l’objet avec sa repro­duc­tion en image. En revanche, elle prend en compte l’altération de la réal­ité engen­drée par la vision du doc­u­men­tariste. Cette dernière est ren­due per­cep­ti­ble au sein des films. La méth­ode doc­u­men­taire de Rob Rom­bout se fonde sur l’opération de la con­struc­tion filmique entre­prise dès le pro­jet de film jusqu’au mon­tage. Elle com­bine une grande maîtrise des fac­teurs aléa­toires du réel, qui peut être affil­iée aux créa­tions de fic­tions, et un respect des pro­priétés du sujet traité rel­e­vant de l’entreprise doc­u­men­taire et ce, afin de don­ner à voir une réal­ité. Celle-ci naît ain­si des rap­ports com­plex­es entre le réal­isa­teur, le proces­sus de réal­i­sa­tion, les per­son­nes filmées et leur environnement.

« L’objectif de ce ciné­ma doc­u­men­taire n’est pas seule­ment d’informer mais aus­si de porter une vision du monde. »

L’objectif de ce ciné­ma doc­u­men­taire n’est pas seule­ment d’informer mais aus­si de porter une vision du monde.
A tra­vers qua­tre aspects de la démarche de Rob Rom­bout, à savoir le choix du sujet, le fil­mage, le mon­tage et le sens don­né au réel à tra­vers les films, il est pos­si­ble d’aborder cette con­cep­tion sin­gulière du documentaire.

Extract of Ams­ter­dam Sto­ries USA, by Rob Rom­bout and Roger van Eck, 2013



1. Réalité choisie et partagée

Par­tant du con­stat que la réal­ité pure et unique n’existe pas et, par con­séquent que les valeurs des faits, des sit­u­a­tions, des images et des idées ne sont pas équiv­a­lentes, il revient au doc­u­men­tariste de con­stru­ire, de struc­tur­er les réal­ités afin de leur don­ner sens.
Dans le pilote du film Nord Express (1990), Rob Rom­bout livre un indice de cette con­cep­tion du doc­u­men­taire. Selon lui, il s’agit de choisir des aspects de la réal­ité, de les isol­er et de les met­tre en scène. Au sein de ces aspects, des phénomènes, des images ou des pro­pos clefs peu­vent être mis en évi­dence. Cette méth­ode débute dès l’élaboration du pro­jet qui devient une étape déci­sive au même titre que le fil­mage et le mon­tage. En cela, les doc­u­men­taires de Rob Rom­bout dif­fèrent des reportages fondés en grande par­tie sur la col­lecte des images, des témoignages et des « scoops » sur le ter­rain. Ils se dis­tinguent égale­ment de la démarche doc­u­men­taire courante qui con­siste à accu­muler les rush­es puis à les organ­is­er, à en tir­er du sens lors du montage.

La recherche théorique et l’écriture pré­para­toire exigées par le sys­tème de pro­duc­tion et de dif­fu­sion des films trou­vent une place struc­turelle dans la méth­ode de Rob Rom­bout. Cette étape lui per­met de pro­pos­er une sorte de scé­nario imag­i­naire qui est par la suite con­fron­té à la réal­ité. Il faut alors trou­ver un équili­bre entre la théorie et l’expérience empirique.
Comme pour les films de fic­tion, un cast­ing est réal­isé et les choix sont déter­minés en fonc­tion du scé­nario. Une per­son­ne peut être invitée à par­ticiper au doc­u­men­taire pour son physique, pour son car­ac­tère ou par exem­ple pour son méti­er. Il s’agit donc de con­stituer un « échan­til­lon » d’individus, pour employ­er un terme de soci­olo­gie. Celui-ci doit être représen­tatif à la fois de la sit­u­a­tion du ter­rain et de la théorie.

« Rob Rom­bout filme de préférence des per­son­nes ordi­naires dont les sit­u­a­tions ou les con­di­tions de vie ne sont pas excep­tion­nelles et par là n’absorbent pas les per­son­nal­ités con­cernées d’une part et ne cap­tivent pas les spec­ta­teurs d’autre part. »

Afin d’obtenir un groupe cohérent d’individus con­scients de leur sit­u­a­tion et de leur fonc­tion au sein du doc­u­men­taire, Rob Rom­bout filme de préférence des per­son­nes ordi­naires dont les sit­u­a­tions ou les con­di­tions de vie ne sont pas excep­tion­nelles et par là n’absorbent pas les per­son­nal­ités con­cernées d’une part et ne cap­tivent pas les spec­ta­teurs d’autre part. Ain­si, il priv­ilégie les sujets qui ne s’inscrivent pas dans une actu­al­ité brûlante et prob­lé­ma­tique dont les pro­tag­o­nistes, dému­nis, peu­vent rapi­de­ment être trompés ou abusés même involon­taire­ment par les doc­u­men­taristes. Les sujets des films de Rob Rom­bout ne trait­ent pas non plus de thé­ma­tiques usitées qui engen­dr­eraient inéluctable­ment des pro­pos sans sur­prise et des con­clu­sions mainte fois affir­mées. Par exem­ple, le sujet du racisme mèn­erait Rob Rom­bout, à l’instar de la plu­part des réal­isa­teurs, à une dénon­ci­a­tion de cette forme de pen­sée. Suiv­ant une autre stratégie, les films de Rob Rom­bout se jouent des stéréo­types, des idées pré­conçues. Dans le film Les Pas­sagers d’Alsace (2002) par exem­ple, qui inter­roge les rap­ports entre les alsa­ciens et le ter­ri­toire d’Alsace, le musi­cien Philippe Poiri­er, com­pos­i­teur du groupe de rock Kat Ono­ma, révèle ses qual­ités d’orateur, le vitic­ul­teur André Ostertag dévoile ses tal­ents de poète, l’athlète Ibtis­sam Mel­lou­ki con­fie sa pas­sion pour la musique rap et l’ophtalmologue Hen­ri Drey­fus, qui fait des recherch­es à l’Hôpital civ­il de Stras­bourg, parvient à faire voir des gens qui ne regar­dent plus. Ain­si, les per­son­nes filmées restent certes qual­i­fiées par leur cul­ture, leur pro­fes­sion ou activ­ité, leur envi­ron­nement géo­graphique et social mais elles affir­ment égale­ment autre chose qui dépasse les a priori.

« Les sujets des films de Rob Rom­bout ne trait­ent pas non plus de thé­ma­tiques usitées qui engen­dr­eraient inéluctable­ment des pro­pos sans sur­prise et des con­clu­sions mainte fois affirmées. »

Pour ce faire, un rap­port de com­préhen­sion mutuelle doit être instau­ré entre le réal­isa­teur et les par­tic­i­pants au doc­u­men­taire. Aus­si, Rob Rom­bout cherche à tra­vailler avec des per­son­nes « armées » [2] lorsqu’elles sont en sit­u­a­tion de tour­nage et qu’elles acceptent d’être le sujet d’un doc­u­men­taire. Le con­tact avec ce type de per­son­nes dans le cadre de la réal­i­sa­tion d’un film lui offre une grande lib­erté sur le plan artis­tique. Il s’avère égale­ment être moins con­traig­nant quant aux prob­lèmes éthiques. Inverse­ment, lorsque la dif­férence entre le réal­isa­teur et les sujets est très grande, les échanges humains devi­en­nent moins évi­dents, moins naturels et moins ouverts. Dans cette per­spec­tive, afin d’accentuer la com­préhen­sion mutuelle entre les deux par­ties, Rob Rom­bout amé­nage des moments d’échanges non enreg­istrés entre lui et les per­son­nes impliquées. Cette pra­tique, effec­tuée au cours de la réal­i­sa­tion, lui per­met d’expliquer et de com­mu­ni­quer sa démarche et ses inten­tions. Non seule­ment ces temps de dia­logues per­me­t­tent de ren­forcer la con­fi­ance réciproque entre le réal­isa­teur et les inter­venants mais ils provo­quent aus­si un engage­ment cer­tain de la part des per­son­nes filmées qui, con­traire­ment aux acteurs de fic­tions, ne sont pas rémunérées.
Dans Les pas­sagers d’Alsace, le doc­u­men­tariste est allé plus loin dans cette recherche de l’échange. Il a organ­isé une ren­con­tre entre les dif­férentes per­son­nes sélec­tion­nées lors du cast­ing. L’entente a ain­si pu s’étendre entre tous les par­tic­i­pants au film. Cette mise en con­di­tion peut faire penser au doc­u­men­taire inti­t­ulé Chronique d’un été de Jean Rouch et d’Edgar Morin tourné en France en 1960 dans lequel de jeunes parisiens issus de milieux soci­aux dif­férents, qui devaient répon­dre aux ques­tions « Com­ment vis-tu ? Est-tu heureux ? », ont été filmés lors de ren­con­tres organ­isées par les réalisateurs.

Dans une même logique de com­mu­ni­ca­tion entre les par­tic­i­pants et le réal­isa­teur, Rob Rom­bout fait cir­culer des notes à l’attention de son équipe de tour­nage. Et ce, dans le but de pré­cis­er les ori­en­ta­tions du film éventuelle­ment mod­i­fiées par la con­fronta­tion de l’idée d’origine à la réal­ité. Ce doc­u­ment peut par exem­ple éviter au caméra­man d’avoir recours à des réflex­es tech­niques et pro­fes­sion­nels mais con­venus des­tinés à rat­trap­er les imprévus con­sid­érés comme des défauts dans l’esthétique ou le lan­gage ciné­matographique. Par ailleurs, il per­met à Rob Rom­bout de fix­er ses idées, de pré­cis­er sa vision sur le sujet traité et surtout d’accroître sa maîtrise dans la réal­i­sa­tion du film.

Extrait de Les pas­sagers de l’Al­sace, par Rob Rom­bout, 2002



2. Mise en scène de la réalité

Suite aux deux pre­mières étapes de la démarche doc­u­men­taire de Rob Rom­bout, à savoir l’exécution du dossier préal­able, qui rassem­ble le tra­vail pré­para­toire de recherche et d’écriture, puis le cast­ing, les per­son­nes sélec­tion­nées sont filmées dans leur envi­ron­nement. Lorsqu’elles sont dirigées dans leurs déplace­ments, leur statut au sein de la réal­i­sa­tion peut évo­quer celui des acteurs non pro­fes­sion­nels, appelés « mod­èles », que Robert Bres­son employ­ait pour ses films de fic­tion. Cepen­dant, au lieu d’être placées dans une sit­u­a­tion fic­tive et d’adopter une autre iden­tité, elles restent dans leur con­texte habituel de vie. Out­re le place­ment des per­son­nes dans le champ de la caméra, l’étude des poten­tiels lumineux des sites et l’utilisation de fil­tres sont des moyens de maîtrise des con­di­tions de fil­mage qui entrent en ligne de compte en tant que réal­ités influ­entes sur la sit­u­a­tion décrite. Il s’agit en quelque sorte de « mon­ter le film directe­ment lors du tour­nage » [3].

« Le réal­isa­teur ne fait pas croire aux spec­ta­teurs qu’il présente la réal­ité pure mais il pro­pose une re-con­struc­tion, une resti­tu­tion homogène d’un aspect du monde dont la valeur de vérité peut être perçue comme métonymique. »

Les doc­u­men­taires de Rob Rom­bout sont bien fondés sur des pra­tiques couram­ment asso­ciées à la [4]. Toute­fois, ils parvi­en­nent à con­cili­er ces procédés à d’autres rel­e­vant du doc­u­men­taire. L’aspect fic­tion­nel et la part doc­u­men­taire sont ren­dus sen­si­bles à tra­vers les images et les sons. Ain­si, le réal­isa­teur ne fait pas croire aux spec­ta­teurs qu’il présente la réal­ité pure mais il pro­pose une re-con­struc­tion, une resti­tu­tion homogène d’un aspect du monde dont la valeur de vérité peut être perçue comme métonymique. Autrement dit, loin d’obtenir des films hybrides tels que les docu-fic­tions, qui se ser­vent des pou­voirs de con­vic­tions de la fic­tion pour impos­er un point de vue alors affir­mé comme l’unique réal­ité, ou tels que des films dual­istes, qui démon­trent l’antinomie du doc­u­men­taire vis-à-vis de la fic­tion, Rob Rom­bout pro­duit des doc­u­men­taires dont la démarche et la présence de l’équipe de tour­nage sur les lieux d’investigation ne sont pas niées.
En amont, les per­son­nes filmées sont sou­vent dirigées. Non seule­ment elles restent aver­ties de la présence de la caméra mais elles ten­dent aus­si, con­sciem­ment ou non, à pren­dre une atti­tude d’auto présen­ta­tion. Celle-ci est toute­fois con­trée par la dis­so­ci­a­tion, récur­rente dans les films de Rob Rom­bout, entre l’image d’un indi­vidu aver­ti du fil­mage et ses paroles enreg­istrées à un autre moment dans le con­texte plus intimiste de l’entretien réal­isé sans caméra.
En aval, les spec­ta­teurs sont sen­si­bil­isés à cette con­cep­tion du doc­u­men­taire lorsque les effets atmo­sphériques sont vis­i­ble­ment arti­fi­ciels ou lorsque les cadrages accusent la posi­tion de l’appareil d’enregistrement dans l’espace. Par exem­ple, la caméra reste par­fois en retrait pour filmer les activ­ités des per­son­nes. Ce point de vue témoigne du respect de leur espace, de leur intim­ité et de leur activ­ité qui n’est pas entravée. Dans une même logique, des objets fréquem­ment placés au pre­mier plan obstru­ent en par­tie le champ. Ain­si, ils ren­dent compte de la con­fig­u­ra­tion du lieu de tour­nage sou­vent exigu comme les trains ou les bateaux. Rob Rom­bout recon­naît qu’il fait « par­tie du paysage » à exposer.

« L’idée n’est pas de mon­tr­er le réel brut, (…) mais de com­mu­ni­quer une réal­ité déter­minée par la vision du documentariste (…). »

Il s’agit donc bien pour lui de tra­vailler sur les rap­ports qu’il établit, en tant que réal­isa­teur, avec la réal­ité filmée (per­son­nes et envi­ron­nements) et les spec­ta­teurs. Ces rap­ports sont con­crétisés par le film. L’idée n’est pas de mon­tr­er le réel brut, tel qu’il exis­terait indépen­dam­ment de ses con­tacts avec le réal­isa­teur et avec le proces­sus de réal­i­sa­tion mais de com­mu­ni­quer une réal­ité déter­minée par la vision du doc­u­men­tariste et par l’entreprise doc­u­men­taire. Autrement dit, cette réal­ité n’existe pas par elle-même mais elle résulte des échanges con­stants « entre les choses qui sont et celui pour qui elles sont » [5]. Dans Essai sur la sig­ni­fi­ca­tion au ciné­ma, Chris­t­ian Metz dégage de la Phénoménolo­gie l’idée selon laque­lle « Le “il y a”, puisqu’il implique qu’il y ait quelque chose et qu’il y ait quelqu’un pour qui il y a quelque chose, mobilise à lui seul l’objet filmé et le fil­mage. » [6]

De la sorte, si Rob Rom­bout plan­i­fie le fil­mage et prend en compte sa vision sur le monde c’est-à-dire qu’il con­sid­ère le sujet regar­dant, il tient égale­ment compte des car­ac­téris­tiques des sites relevés lors de repérages. Une fois encore, idée et réal­ité doivent être équili­brées. Ses doc­u­men­taires por­tent fréquem­ment sur un groupe de per­son­nes dans un espace lim­ité tels qu’une équipe de tra­vailleurs sur une plate-forme pétrolière (L’Île Noire, 1994), des pas­sagers et des employés du train Nord Express (1990) ou ceux du bateau Transat­lan­tique Queen Eliz­a­beth 2 (1992) ou encore des chercheurs embar­qués sur un navire à des­ti­na­tion des îles Ker­gue­len (Le piège de Ker­gue­len, 1999). Il s’agit donc de groupes d’individus séparés du reste du monde, vivant en com­mu­nauté dans un lieu lim­ité pour une péri­ode don­née. Dans ce type de con­textes, les jeux d’optique dus aux objec­tifs et à la posi­tion de la caméra sont accen­tués. Filmés depuis l’une des extrémités, les couloirs parais­sent plus étroits. De même, les machines vues en con­tre-plongée acquièrent une mon­u­men­tal­ité par­fois oppres­sante. Le con­fine­ment peut ain­si être ressen­ti par les spec­ta­teurs par le biais de sen­sa­tions visuelles. Par ailleurs, cer­tains cadrages larges présen­tent les lieux dans leurs con­textes géo­graphiques plus vastes. Ils accusent leur isole­ment. Ain­si, le bateau ou la plate-forme pétrolière retrou­ve sa sit­u­a­tion dans l’immensité de la mer au sein d’un cadre large. Mal­gré l’absence de liens physiques entre ces sites et la société, les rela­tions tem­po­raire­ment sus­pendues entre ces microso­ciétés et le reste du monde sont évo­quées à tra­vers les témoignages, les con­fi­dences des gens. La sit­u­a­tion décrite est ain­si local­isée physique­ment et men­tale­ment dans l’environnement qui l’englobe. Les spec­ta­teurs restent con­scients de la nature d’échantillon isolé mais néces­saire­ment inclus dans l’ensemble de la vie humaine et sociale. Dans Les Açores de Madredeus (1995), les îles sont certes isolées mais elles ne sont pas exiguës. Elles sont alors présen­tées comme un cen­tre ouvert sur l’horizon mar­itime qui résonne avec les thèmes et l’univers musi­cal du groupe por­tu­gais, Madredeus. Par exem­ple, lorsque les musi­ciens et la chanteuse sont filmés dans un intérieur, les fenêtres lais­sent appa­raître la mer ou le ciel. Si le site a été choisi pour fig­ur­er au mieux le regard et les sen­ti­ments que Rob Rom­bout porte au groupe et à leur musique, cela ne sig­ni­fie pas que la vision du réal­isa­teur se soumet au sujet et à l’environnement choi­sis. Autrement dit, le fil­mage et le mon­tage ne sont pas dépen­dants des déplace­ments des per­son­nes ou des con­tin­gences des phénomènes extérieurs. Par exem­ple, l’enregistrement en cadrage fixe précède l’entrée de la chanteuse dans le champ de la caméra et con­tin­ue après sa sor­tie. Le même procédé se retrou­ve dans Nord Express (1990), lorsque les per­son­nes inter­viewées appa­rais­sent dans un espace préex­is­tant à l’écran, par­lent puis dis­parais­sent. L’espace qu’ils ont occupé demeure vide quelques instants avant le change­ment de plan. Dans ce film, il est pos­si­ble de penser à la péren­nité du train, à la con­stance de l’écoulement du temps qui se laisse tra­vers­er par des événe­ments his­toriques (les deux Guer­res mon­di­ales) et par des indi­vidus en tant que pas­sagers du train et de l’histoire. Le train dans ce doc­u­men­taire se présente à la fois comme moyen de lier des lieux éloignés géo­graphique­ment, des épo­ques séparées chronologique­ment, comme un fil con­duc­teur du déroule­ment de la nar­ra­tion et comme un espace réduit per­ma­nent et en mou­ve­ment.
Dans Les Pas­sagers d’Alsace (2002), la con­struc­tion filmique imite le déplace­ment et la prox­im­ité involon­taire des pas­sagers des trains. D’une part, elle met ain­si l’accent sur les rela­tions con­crètes de chaque per­son­ne au ter­ri­toire grâce à l’abondance du fil­mage de leurs déplace­ments au sein de la ville ou de la cam­pagne. Les trav­el­lings latéraux et avant non seule­ment don­nent un point de vue en mou­ve­ment sur les paysages mais sem­blent emporter avec eux les his­toires des dix pro­tag­o­nistes alsa­ciens. D’autre part, le mon­tage crée un réseau d’échange de regards et d’écoutes entre per­son­nes filmées. Vers la fin du doc­u­men­taire, une séquence est élo­quente à ce pro­pos. Le dis­cours en off de la jeune ath­lète se fait enten­dre sur des images de l’un de ses entraîne­ments. Alors que ses pro­pos occu­pent encore l’espace de la bande-son, un court plan-séquence mon­tre la psy­cho­logue Sylvie Levy à l’écoute. Puis l’image d’Ibtissam Mel­lou­ki, en train de par­ler depuis un stu­dio d’enregistrement, revient à l’écran. Ce mon­tage d’images hétérogènes quant au con­tenu asso­cié à une bande son con­tin­ue donne l’illusion aux spec­ta­teurs du doc­u­men­taire que la sportive s’adresse à la psy­cho­logue. Puis, l’image qui suit étend l’échange fic­tif au com­pos­i­teur du groupe de musique stras­bour­geois Kat Ono­ma qui sem­ble répon­dre à la jeune fille. Cette dernière paraît même l’écouter dans le plan suiv­ant. Chris­t­ian Ohrel, mécani­cien retraité ama­teur de chemin de fer, et le réal­isa­teur Daniel Ziegler entrent dans cette com­mu­ni­ca­tion illu­soire selon le même principe à savoir l’union de réal­ités dis­tinctes grâce au tra­vail con­joint de l’image et du son. Cette séquence devient d’autant plus homogène que les thèmes abor­dés par les dif­férents pro­tag­o­nistes s’enchaînent naturelle­ment comme cela est le cas lors de dis­cus­sion. La ques­tion de l’opposition entre la cam­pagne et la ville glisse vers celle de la cir­cu­la­tion urbaine qui mène aux car­ac­tères du bruit de la ville. Le déroule­ment de la réflex­ion arti­fi­cielle­ment col­lec­tive s’achève sur l’importance du silence. À ce moment, les divers pro­tag­o­nistes sont vus à l’écran, muets et à l’écoute du silence comme pour suiv­re la propo­si­tion d’Aurore Hum­bert, jour­nal­iste pour une radio locale RBS [7], qui explique durant la même séquence que « écouter les gens, c’est par exem­ple aus­si écouter leurs silences » ou encore pour expéri­menter le moyen de com­préhen­sion indiqué par la psy­cho­logue selon lequel « le silence donne sens ».

Dans Les Açores de Madredeus, une séquence est par­ti­c­ulière­ment intéres­sante à la fois en ce qui con­cerne ce tra­vail de com­po­si­tion avec le site et les réal­ités choisies par le biais du fil­mage et du mon­tage ain­si que pour la part de recherch­es expéri­men­tales qui qual­i­fie ce type de séquences. Cha­cun des qua­tre plans con­sacré à un musi­cien est enreg­istré au niveau d’une des qua­tre routes qui mènent à la place d’un vil­lage. Ils accom­pa­g­nent un morceau à qua­tre temps. Aucun plan inter­mé­di­aire ne per­met de créer une con­ti­nu­ité dans l’espace qui s’affirme ain­si dans sa struc­ture mor­phologique symétrique et centralisée.

Extrait de The Azores of Madredeus, par Rob Rom­bout, 1995



3. L’épaisseur de la réalité ou l’implication du facteur temps

Dans Perm-mis­sion, la voix off per­for­mée par Andrey Osipov, l’un des inter­locu­teurs russ­es présents au fes­ti­val de ciné­ma qui s’est tenu dans la ville russe de Perm, for­mule une con­cep­tion du doc­u­men­taire qui sem­ble avoir été souf­flée par Rob Rom­bout : « Le film doc­u­men­taire ne se con­tente pas d’illustrer et de con­stater des faits. Il tente d’analyser et d’approfondir les choses sur le plan artis­tique pour com­pren­dre ce qui se passe dans le temps présent et les liens entre le passé et l’avenir. » (Perm-mis­sion, 1999).

« Le recours à des cartes, qui per­me­t­tent de fig­ur­er les tra­jets, est fréquent dans les films de Rob Rombout. »

La volon­té de mon­tr­er le passé et/ou le futur pos­si­ble implique des aspects intan­gi­bles de la réal­ité.
Dans Nord Express, des images d’archives sont mêlées à d’autres filmées en 1990 afin de présen­ter l’histoire pérenne du train entre Paris et Moscou. Des cartes uni­fient l’hétérogénéité des images, tant au niveau de leurs natures qu’à celui de leur temps de référence. Le par­cours fig­uré dans un sys­tème de représen­ta­tion con­ceptuelle per­met de con­vo­quer simul­tané­ment la don­née spa­tiale et con­crète ain­si que celle tem­porelle et abstraite. Le recours à des cartes, qui per­me­t­tent de fig­ur­er les tra­jets, est fréquent dans les films de Rob Rom­bout. Par ailleurs, dans Nord Express, les images d’archive s’intègrent par­faite­ment au film grâce à un sys­tème d’association thé­ma­tique. Par exem­ple, au cours du tra­jet entre Paris et Berlin, le paysage défi­lant se car­ac­térise par un petit muret séparant les rails de la nature. Des images de la con­struc­tion du mur sont alors jux­ta­posées à celles de sa destruc­tion. Non seule­ment le par­cours du train jalonne l’Histoire mais la con­den­sa­tion du temps fait écho au rap­proche­ment géo­graphique ren­du pos­si­ble par le biais du moyen de transport.

Dans la plu­part des films de Rob Rom­bout, le passé proche, celui du temps de la réal­i­sa­tion du doc­u­men­taire est con­vo­qué. Ce par­ti pris con­tribue à la mise en évi­dence de l’entreprise doc­u­men­taire et de son influ­ence inévitable sur l’environnement et les per­son­nes filmées.
Un procédé, récur­rent dans les films de Rob Rom­bout, con­siste à mon­ter en voix off les pro­pos des per­son­nes filmées alors qu’elles sont vues à l’image dans une autre sit­u­a­tion que celle de l’entretien. Con­tre­dis­ant le présent tou­jours renou­velé lors du vision­nage pro­pre aux images en mou­ve­ment, deux moments dis­tincts s’expriment simul­tané­ment : celui d’une inter­view occupe l’espace sonore et celui d’une action est vis­i­ble à l’écran. D’une part, l’instant du vision­nage vécu par le spec­ta­teur est dédou­blé et d’autre part, la durée néces­saire à la réal­i­sa­tion du doc­u­men­taire est révélée et ce, grâce à la simul­tanéité de deux étapes dif­férentes dans son proces­sus. Ain­si, une dis­tance, tant tem­porelle que spa­tiale, entre les images et les paroles s’instaure.
De temps à autres, lorsqu’à l’image les per­son­nes sont en train de dis­cuter entre elles, le son de leur voix est étalon­né de faible inten­sité sonore. Lors de ces séquences, les deux moments sont ressen­tis comme net­te­ment dis­tincts : le temps du dis­cours dif­fère de celui des images. L’effet qui en résulte peut s’apparenter à une écoute dis­traite, lorsque l’on entend quelqu’un par­ler mais que l’on écoute par vrai­ment, que l’on suit plutôt le court de ses pen­sées. La voix off enten­due s’approche alors de la pen­sée du spec­ta­teur. « C’est comme si l’on ren­trait dans la tête de quelqu’un » explique Rob Rom­bout.
Dans Transat­lan­tique Queen Eliz­a­beth 2 (1992), un pas­sage déroutant mérite d’être cité car il joue avec ce procédé. Le cap­i­taine est filmé en pleine activ­ité. Soudain, il regarde la caméra. Sa voix passe de l’espace sonore off à celui syn­chrone aux images pour racon­ter sa tra­ver­sée de l’Atlantique avec son père. Puis, il reprend son tra­vail et la nar­ra­tion se ter­mine en off. Dans cette séquence, plusieurs moments se téle­scopent. La recon­struc­tion, la resti­tu­tion d’un présent, celui du film, ne peut pas se sous­traire à la con­science du spec­ta­teur. L’ambiguïté entre la fic­tion, le jeu d’acteur d’une part et le doc­u­men­taire, le témoignage d’autre part qual­i­fie cette séquence.

« Le mon­tage en décalé des paroles et des images révèle l’hétérogénéité de la réal­ité, sa rel­a­tiv­ité et son état en per­pétuel change­ment dans le temps. »

Out­re la vis­i­bil­ité de la pra­tique doc­u­men­taire et de sa durée, le mon­tage en décalé des paroles et des images révèle l’hétérogénéité de la réal­ité, sa rel­a­tiv­ité et son état en per­pétuel change­ment dans le temps.
Dans Perm-mis­sion (1999), la voix off du doc­u­men­tariste ne s’impose pas comme l’unique inter­pré­ta­tion val­able de la sit­u­a­tion à doc­u­menter car elle n’est plus extérieure mais elle est traitée de la même façon que les voix des autres per­son­nes impliquées. Autrement dit, Rob Rom­bout s’est inclus dans l’échantillon filmé com­posé de doc­u­men­taristes qui doivent représen­ter un aspect de leur méti­er dans le cadre du fes­ti­val russe Fla­hertyana. Con­fron­tée à d’autres sub­jec­tiv­ités, la voix de Rob Rom­bout est une voix par­mi d’autres.
Cette prob­lé­ma­tique de la voix off a égale­ment été ques­tion­née par Jean Rouch à tra­vers plusieurs films. Dans Moi, un noir (1958) et Jaguar (tourné en 1954 et mon­té en 1967) par exem­ple, Jean Rouch aban­donne ses com­men­taires per­son­nels élaborés après le fil­mage à par­tir des images, de son expéri­ence et de ses con­nais­sances. Il con­serve, tout de même, un écart d’une autre nature entre l’image et la parole en deman­dant aux pro­tag­o­nistes des films de pro­duire un com­men­taire, non pas au moment du fil­mage, c’est-à-dire en enreg­istrement sonore syn­chrone, mais a pos­te­ri­ori, lors de la post-pro­duc­tion. [8] Ain­si, la dis­tance tem­porelle entre l’image et la parole est con­servée mais le dis­cours ne s’érige pas en voix dom­i­nante et déten­trice de vérité absolue comme cela est le cas des com­men­taires tra­di­tion­nels. [9] Ce procédé adop­té par Jean Rouch pour cer­tains de ses films, dans lesquels les pro­tag­o­nistes nigériens par­lent français, est sim­i­laire à celui affec­tion­né et décliné par Rob Rom­bout. Les deux solu­tions ont l’avantage de respecter la parole de l’autre. Elles définis­sent l’activité du doc­u­men­tariste en par­tie comme une pra­tique de l’écoute de l’autre, voire comme un relais entre des aspects sin­guliers de la réal­ité et les spec­ta­teurs. Toutes les deux assu­ment leur inter­ven­tion dans la sit­u­a­tion présentée.

Dans Le piège de Ker­gue­len (2000), une voix off, tra­di­tion­nelle dans le domaine du doc­u­men­taire, adopte un ton semi didac­tique qui ren­voie aux films des années cinquante [10]. Per­for­mée par Rob Rom­bout, elle livre des infor­ma­tions sup­plé­men­taires sur le sujet traité. En cela, elle prend totale­ment en charge la fonc­tion assurée con­join­te­ment par les images d’archive et par la voix off [11] dans Nord Express (1990). Elle ne cor­re­spond à aucune per­son­ne filmée. Extérieure à la sit­u­a­tion décrite, elle pro­duit un effet de dis­tan­ci­a­tion vis-à-vis de l’image et de la réal­ité filmée. Out­re les deux moments précédem­ment dis­tin­gués, celui plus dis­tan­cié de la voix off extérieure com­plex­i­fie le temps élaboré dans le film. Il y a le moment des entre­tiens, celui du fil­mage et celui du com­men­taire. La sépa­ra­tion entre le temps des images et celui du com­men­taire trou­ve son orig­ine dans l’histoire de la tech­nique ciné­matographique. En effet, avant la fin des années cinquante, les caméras ne per­me­t­taient pas de réalis­er des enreg­istrements sonores syn­chrones à l’image. Si la fic­tion s’est d’emblée emparée de la nou­velle pos­si­bil­ité de l’enregistrement sonore en direct, les doc­u­men­taires ont per­pé­tué la tra­di­tion du com­men­taire extérieur appliqué sur des images lors du mon­tage. Ceci per­me­t­tait aux doc­u­men­taristes de con­serv­er leur pou­voir d’affirmer la réal­ité, voire d’imposer une vérité qui est pour­tant par nature un point de vue, une inter­pré­ta­tion, une appréhen­sion sub­jec­tive du monde. Dif­férem­ment, dans Le piège de Ker­gue­len (2000), la voix off extérieure est adop­tée afin de don­ner corps au passé. Con­crète­ment, soit elle incar­ne le point de vue du cheva­lier Ker­gue­len en citant son jour­nal de bord, soit elle énonce des faits his­toriques ou encore elle lie le passé au présent par le biais de comparaisons.

« Le mon­tage en décalé des paroles et des images révèle l’hétérogénéité de la réal­ité, sa rel­a­tiv­ité et son état en per­pétuel change­ment dans le temps. »

Out­re la vis­i­bil­ité de la pra­tique doc­u­men­taire et de sa durée, le mon­tage en décalé des paroles et des images révèle l’hétérogénéité de la réal­ité, sa rel­a­tiv­ité et son état en per­pétuel change­ment dans le temps.
Dans Perm-mis­sion (1999), la voix off du doc­u­men­tariste ne s’impose pas comme l’unique inter­pré­ta­tion val­able de la sit­u­a­tion à doc­u­menter car elle n’est plus extérieure mais elle est traitée de la même façon que les voix des autres per­son­nes impliquées. Autrement dit, Rob Rom­bout s’est inclus dans l’échantillon filmé com­posé de doc­u­men­taristes qui doivent représen­ter un aspect de leur méti­er dans le cadre du fes­ti­val russe Fla­hertyana. Con­fron­tée à d’autres sub­jec­tiv­ités, la voix de Rob Rom­bout est une voix par­mi d’autres.
Cette prob­lé­ma­tique de la voix off a égale­ment été ques­tion­née par Jean Rouch à tra­vers plusieurs films. Dans Moi, un noir (1958) et Jaguar (tourné en 1954 et mon­té en 1967) par exem­ple, Jean Rouch aban­donne ses com­men­taires per­son­nels élaborés après le fil­mage à par­tir des images, de son expéri­ence et de ses con­nais­sances. Il con­serve, tout de même, un écart d’une autre nature entre l’image et la parole en deman­dant aux pro­tag­o­nistes des films de pro­duire un com­men­taire, non pas au moment du fil­mage, c’est-à-dire en enreg­istrement sonore syn­chrone, mais a pos­te­ri­ori, lors de la post-pro­duc­tion. [8] Ain­si, la dis­tance tem­porelle entre l’image et la parole est con­servée mais le dis­cours ne s’érige pas en voix dom­i­nante et déten­trice de vérité absolue comme cela est le cas des com­men­taires tra­di­tion­nels. [9] Ce procédé adop­té par Jean Rouch pour cer­tains de ses films, dans lesquels les pro­tag­o­nistes nigériens par­lent français, est sim­i­laire à celui affec­tion­né et décliné par Rob Rom­bout. Les deux solu­tions ont l’avantage de respecter la parole de l’autre. Elles définis­sent l’activité du doc­u­men­tariste en par­tie comme une pra­tique de l’écoute de l’autre, voire comme un relais entre des aspects sin­guliers de la réal­ité et les spec­ta­teurs. Toutes les deux assu­ment leur inter­ven­tion dans la sit­u­a­tion présentée.

Dans Le piège de Ker­gue­len (2000), une voix off, tra­di­tion­nelle dans le domaine du doc­u­men­taire, adopte un ton semi didac­tique qui ren­voie aux films des années cinquante [10]. Per­for­mée par Rob Rom­bout, elle livre des infor­ma­tions sup­plé­men­taires sur le sujet traité. En cela, elle prend totale­ment en charge la fonc­tion assurée con­join­te­ment par les images d’archive et par la voix off [11] dans Nord Express (1990). Elle ne cor­re­spond à aucune per­son­ne filmée. Extérieure à la sit­u­a­tion décrite, elle pro­duit un effet de dis­tan­ci­a­tion vis-à-vis de l’image et de la réal­ité filmée. Out­re les deux moments précédem­ment dis­tin­gués, celui plus dis­tan­cié de la voix off extérieure com­plex­i­fie le temps élaboré dans le film. Il y a le moment des entre­tiens, celui du fil­mage et celui du com­men­taire. La sépa­ra­tion entre le temps des images et celui du com­men­taire trou­ve son orig­ine dans l’histoire de la tech­nique ciné­matographique. En effet, avant la fin des années cinquante, les caméras ne per­me­t­taient pas de réalis­er des enreg­istrements sonores syn­chrones à l’image. Si la fic­tion s’est d’emblée emparée de la nou­velle pos­si­bil­ité de l’enregistrement sonore en direct, les doc­u­men­taires ont per­pé­tué la tra­di­tion du com­men­taire extérieur appliqué sur des images lors du mon­tage. Ceci per­me­t­tait aux doc­u­men­taristes de con­serv­er leur pou­voir d’affirmer la réal­ité, voire d’imposer une vérité qui est pour­tant par nature un point de vue, une inter­pré­ta­tion, une appréhen­sion sub­jec­tive du monde. Dif­férem­ment, dans Le piège de Ker­gue­len (2000), la voix off extérieure est adop­tée afin de don­ner corps au passé. Con­crète­ment, soit elle incar­ne le point de vue du cheva­lier Ker­gue­len en citant son jour­nal de bord, soit elle énonce des faits his­toriques ou encore elle lie le passé au présent par le biais de comparaisons.

« Si dans les films de fic­tion de type hol­ly­woo­d­i­en, les moments creux sont bien sou­vent évincés lors du mon­tage, Rob Rom­bout se per­met, en tant que doc­u­men­tariste, non seule­ment de les con­serv­er mais aus­si de les met­tre en valeur. »

Le temps dans le lan­gage filmique est tou­jours recon­stru­it. Comme en musique, son écoule­ment porte la nar­ra­tion et, avec elle, l’attention des spec­ta­teurs. En jouant sur les effets sub­jec­tifs de la durée, les réal­isa­teurs ont la pos­si­bil­ité de trans­met­tre des sen­sa­tions voire des idées. Si dans les films de fic­tion de type hol­ly­woo­d­i­en, les moments creux sont bien sou­vent évincés lors du mon­tage, Rob Rom­bout se per­met, en tant que doc­u­men­tariste, non seule­ment de les con­serv­er mais aus­si de les met­tre en valeur. Selon lui, ces instants de pause, d’inattention, d’abandon ou encore d’hésitation, de doute sont révéla­teurs de vérité. Pour don­ner un exem­ple con­cret, dans L’Île Noire (1994) des séquences dens­es tant au niveau sonore que visuel peu­vent être jux­ta­posées à des séquences calmes sou­vent filmées en plan fixe dans lesquelles le mou­ve­ment peut-être totale­ment absent. Ain­si, le rythme de la suc­ces­sion des séquences d’images et de sons ain­si que les suc­ces­sions d’actions au sein même de l’image per­me­t­tent d’accuser le con­traste entre les deux atmo­sphères c’est-à-dire d’accentuer la tran­quil­lité d’un côté et l’agitation de l’autre.

Extrait de L’Île noire, par Rob Rom­bout, 1994

« La musique fait l’objet d’une atten­tion par­ti­c­ulière de la part du réalisateur. »



4. Correspondance entre le contenu philosophique et la composition formelle du film

Rob Rom­bout com­pare volon­tiers l’art filmique à la musique. Cette dernière, qui est l’une des deux com­posantes du matériel audio-visuel, fait l’objet d’une atten­tion par­ti­c­ulière de la part du réal­isa­teur. Dans ses films, la musique est sou­vent une com­po­si­tion orig­i­nale. Dans ce cas, elle con­stitue une part non nég­lige­able du bud­get. Sur les plans artis­tique et séman­tique, elle per­met de struc­tur­er l’espace, de le solid­i­fi­er, de le cern­er ou d’insister sur l’une ou l’autre de ses car­ac­téris­tiques. Elle peut soulign­er cer­tains pro­pos, sou­vent d’ordre philosophique, en débu­tant au moment clef de son énon­ci­a­tion. Elle peut aus­si accom­pa­g­n­er, isol­er et ain­si ren­dre plus présent un aspect sin­guli­er de la réal­ité. Par exem­ple, dans L’Île Noire (1994), Jean-Louis Daulne com­pose deux morceaux de musique. L’un, inspiré de l’œuvre de Prokofiev, est lié au lieu, c’est-à-dire à la plate-forme pétrolière et à sa machiner­ie. Le sec­ond est une musique Coun­try. Il est asso­cié aux tra­vailleurs et à la dimen­sion humaine voire philosophique. Cha­cun des deux domaines, qui co-exis­tent pour for­mer une sit­u­a­tion par­ti­c­ulière, trou­ve une den­sité et une impor­tance pro­pres grâce à ce procédé d’association entre un thème musi­cal et un aspect de la réal­ité.
Dans Le piège de Ker­gue­len (2000), les sons des instru­ments à cordes [12] don­nent une couleur par­ti­c­ulière au passé, celui de l’expédition de Ker­gue­len, aux pas­sages intem­porels d’ordre philosophique ain­si que, dans une moin­dre mesure, aux allu­sions à l’avenir. Vers la fin du doc­u­men­taire, par exem­ple, Dominique Pon­tier est vue à l’écran en train d’écrire dans son jour­nal de bord. A ce moment la musique inter­vient. La voix de la chercheuse est enten­due en off. Ses pro­pos se con­clu­ent ain­si : « on espère que tout cela restera ». Puis la voix off extérieure prévoit que, lorsque la mis­sion « Pop Chats » [13] pren­dra fin, Dominique Pon­tier retourn­era en métro­pole. Puis, elle opère un rap­proche­ment entre le présent et le passé en racon­tant la fin de la mis­sion de Ker­gue­len. Dans ce film la musique offre une présence au temps sous ses divers­es formes à savoir le passé, qui est dom­i­nant dans le film, le futur prévis­i­ble et son état en sus­pend, c’est-à-dire hors du temps, lors des moments de com­para­i­son entre le passé et le présent ou ceux des réflex­ions philosophiques. Dans ce doc­u­men­taire, les échap­pées philosophiques de l’équipe de sci­en­tifiques sem­blent con­t­a­min­er l’espace des spec­ta­teurs lorsque Dominique Pon­tier est filmée en plan très large. Alors que la chercheuse est perçue de loin en train d’observer les chats sauvages à tra­vers des jumelles, la voix off demande directe­ment aux spec­ta­teurs « mais qui regarde qui ? ». Des réflex­ions sur le regard et « le mon­tré » sont ain­si sus­citées. Le pub­lic peut repren­dre con­science de sa sit­u­a­tion d’observateur, de la vision préal­able de Rob Rom­bout sur la sit­u­a­tion et du tra­vail de présen­ta­tion pro­pre au doc­u­men­taire. Avec les plans sur les pin­gouins et les éléphants de mer juste à côté des sci­en­tifiques, il est aus­si pos­si­ble de soupçon­ner la faune de l’île d’épier les humains nou­veaux arrivants.

« La con­struc­tion des rap­ports entre l’image et le son est un bon exem­ple de la méth­ode doc­u­men­taire de Rob Rombout. »

La con­struc­tion des rap­ports entre l’image et le son est un bon exem­ple de la méth­ode doc­u­men­taire de Rob Rom­bout. En effet, la forme filmique très struc­turée donne du sens et de la pro­fondeur au sujet traité. Elle per­met de présen­ter deux facettes des per­son­nes filmées : celle de leurs activ­ités qui déter­mine forte­ment les indi­vid­u­al­ités selon Rob Rom­bout et celle de leurs réflex­ions per­son­nelles, de leurs poésies trop sou­vent sous-estimées d’après le réal­isa­teur. Ces dernières per­me­t­tent de lever les idées stéréo­typées et con­ven­tion­nelles sur les caté­gories d’individus.

« Rob Rom­bout porte une atten­tion toute par­ti­c­ulière aux moments d’inattention, d’abandon au rêve ou à la philoso­phie, aux lap­sus gestuels et aux mim­iques involon­taires qui font émerg­er des vérités non for­mulées ver­bale­ment mais qui transparais­sent sous une autre forme. »

Le procédé mis au point par le doc­u­men­tariste con­siste donc à pass­er par la con­struc­tion et une cer­taine fix­a­tion préal­able des élé­ments aléa­toires de la réal­ité afin d’atteindre une fig­u­ra­tion du temps et des mod­i­fi­ca­tions qui lui sont cor­réla­tives. Dans cette optique, Rob Rom­bout tente de provo­quer chez les per­son­nes impliquées dans le doc­u­men­taire des glisse­ments du domaine con­cret vers le con­ceptuel. Autrement dit, les pas­sages entre les activ­ités effec­tives et les pro­pos philosophiques sont favorisés grâce aux asso­ci­a­tions d’idées ou à cause des sen­ti­ments sus­cités chez les indi­vidus par l’intervieweur. De plus, Rob Rom­bout porte une atten­tion toute par­ti­c­ulière aux moments d’inattention, d’abandon au rêve ou à la philoso­phie, aux lap­sus gestuels et aux mim­iques involon­taires qui font émerg­er des vérités non for­mulées ver­bale­ment mais qui transparais­sent sous une autre forme. En cela, il s’accorde avec l’idée de l’ethnologue Mar­cel Mauss selon laque­lle la vie sociale et les proces­sus cog­ni­tifs ne passent pas seule­ment par le lan­gage. À l’image de ses pro­pres recherch­es sur le lan­gage filmique, Rob Rom­bout sem­ble ain­si être sen­si­ble aux divers sys­tèmes d’expressions. Lorsqu’il s’agit d’interview dans une langue que le réal­isa­teur ne com­prend pas, par exem­ple, son acuité eu égard aux atti­tudes cor­porelles est aigu­isée. De même, les moments d’extrême con­cen­tra­tion lors d’activités pro­fes­sion­nelles ou au con­traire d’évasion dans des rêver­ies font l’objet de son atten­tion. En ce qui con­cerne les échap­pées intérieures dans les pen­sées, les longs plans fix­es sont les plus à même pour en ren­dre compte aux spec­ta­teurs. Ain­si, dans Les Açores de Madredeus (1995), Tere­sa Salgueiro, la chanteuse du groupe por­tu­gais, est filmée en train de regarder dans le l’immensité du ciel à tra­vers le hublot de l’avion qui l’emmène sur les îles des Açores. Dans Le piège de Ker­gue­len (2000), la chercheuse Dominique Pon­tier observe longue­ment l’étendue de la mer. Pour trans­met­tre les moments de con­cen­tra­tion dans une tache physique, Rob Rom­bout emploie un type de mon­tage qui se retrou­ve dans la plu­part de ses doc­u­men­taires. Out­re l’influence sur les indi­vid­u­al­ités, ces activ­ités témoignent de la rela­tion des indi­vidus avec un envi­ron­nement spé­ci­fique. Ain­si, au sein de courts plans-séquences, les points de con­tacts, d’articulations entre le corps humain et les out­ils ou les machines sont cadrés en plans rap­prochés. Dans le cadre de l’ethnographie, cet intérêt cor­re­spond, selon Clau­dine de France, à la con­cep­tion du « corps out­ils » [14]. Ce type de plan est mêlé à des pris­es de vue tout aus­si cour­tes mais aux angles plus larges. Le mon­tage de L’île Noire (1994) est con­sti­tué de trois types de séquences qui cor­re­spon­dent à des visions dif­férentes et des sujets dis­tincts. Les plans sur­plom­bants don­nent un point de vue général et situe la plate­forme pétrolière dans son envi­ron­nement plus vaste. Rob Rom­bout désigne ce pre­mier type de séquences par l’expression « plan de Dieu ». Le deux­ième cor­re­spond aux « plans psy­chologiques ». Ils ont pour sujets les per­son­nes filmées à 45° (de trois quart) et à une dis­tance moyenne afin qu’elles aient le choix de s’adresser à l’intervieweur ou à la caméra. Ces cadrages imi­tent les sit­u­a­tions de dis­cus­sion dans la vie réelle. Au sein de ces séquences, des moments de rêver­ie peu­vent s’installer. Enfin, le troisième type de plan s’attache au fil­mage du for­age en tant qu’activité néces­si­tant une grande con­cen­tra­tion de la part des tra­vailleurs [15]. Il ponctue le mon­tage en se détachant net­te­ment du reste du doc­u­men­taire. Et ce, grâce au choix du noir et blanc qui vise à sup­primer les couleurs vives des tenues de tra­vail et ain­si, à uni­fi­er les hommes et leur envi­ron­nement. Au sein d’un mon­tage rapi­de, des plans ser­rés sont inter­calés de plans plus larges, par­fois en con­tre-plongée, qui offrent le point de vue du sujet actant [16]. Les spec­ta­teurs peu­vent ain­si ressen­tir pleine­ment la con­fronta­tion de l’homme frag­ile et de l’énorme machiner­ie qui l’écrase par son échelle démesurée. Par ailleurs, lors de ces séquences, les per­son­nes sont présen­tées dans la sit­u­a­tion d’absorbement total dans leurs activ­ités. Le spec­ta­teur qui est intro­duit presque physique­ment dans le lieu restreint, grâce au place­ment de la caméra et qui peut par là même ressen­tir de l’empathie [17] vis-à-vis des indi­vidus filmés, se voit être exclu car tout à fait ignoré par les per­son­nes filmées. La théorie de l’absorbement élaborée par Michael Fried à pro­pos des tableaux français du XVIIe siè­cle jusqu’à Édouard Manet est en adéqua­tion avec la sit­u­a­tion que présente qua­si sys­té­ma­tique­ment Rob Rom­bout. Con­for­mé­ment à l’esprit mod­erniste, voire for­mal­iste, le résul­tat est de met­tre en évi­dence la con­ven­tion fon­da­men­tale du tableau, selon Michael Fried, Diderot et quelques uns de ses con­tem­po­rains, à savoir qu’une œuvre pic­turale est faite pour être vue. Dans le cas des doc­u­men­taires de Rob Rom­bout, l’idée selon laque­lle le film est réal­isé pour être vision­né est ren­due per­cep­ti­ble lors de ce type de séquence. La com­para­i­son que le doc­u­men­tariste opère volon­tiers entre son tra­vail de mise en scène et de cadrage d’une part et d’autre part l’activité du pein­tre fait écho à cette con­cep­tion de la com­po­si­tion picturale. 

« L’attention de Rob Rom­bout se porte donc tout par­ti­c­ulière­ment sur les rap­ports entretenus entre l’homme et son envi­ron­nement au cours d’une péri­ode déterminée. »

L’attention de Rob Rom­bout se porte donc tout par­ti­c­ulière­ment sur les rap­ports entretenus entre l’homme et son envi­ron­nement au cours d’une péri­ode déter­minée. L’interaction inévitable entre cet aspect de la réal­ité et la procé­dure de réal­i­sa­tion des doc­u­men­taires qual­i­fie naturelle­ment la sit­u­a­tion décrite dont le présent est conçu comme la somme du passé.

Cepen­dant, cer­tains moments s’avèrent être plus déter­mi­nants quant au pro­pos des films et à la vision per­son­nelle de Rob Rom­bout. Le doc­u­men­tariste les met alors en évi­dence. Il porte une atten­tion toute par­ti­c­ulière au début et à la con­clu­sion de ses films en leur attribuant les fonc­tions de camper l’atmosphère présen­tée et de sus­citer les réflex­ions que les spec­ta­teurs pour­ront pro­longer une fois le vision­nage terminé.

Avec leurs ouver­tures, leurs développe­ments ponc­tués d’images ou de séquences clefs et leurs clô­tures, les films de Rob Rom­bout sont en accoin­tance avec la musique. Comme les com­pos­i­teurs, le réal­isa­teur doit con­naître le thème pour pou­voir faire des vari­a­tions. En effet, c’est dans le cadre de maîtrise de la réal­i­sa­tion, des prévi­sions, qu’il s’octroie un ou plusieurs moments d’expérimentation [18] dans cha­cun de ses films.

Dans tous ses films, Rob Rom­bout expose un point de vue philosophique sur la réal­ité. Con­sid­érés dans leur ensem­ble, les doc­u­men­taires s’avèrent tout par­ti­c­ulière­ment proches les uns des autres quant à la vision du monde qu’ils pro­posent. Comme les œuvres musi­cales des grands com­pos­i­teurs ou inter­prètes, ils con­stituent un ensem­ble cohérent recon­naiss­able par leur forme et leur philoso­phie. Autrement dit, une touche pro­pre au réal­isa­teur, c’est-à-dire son indi­vid­u­al­ité affir­mée, transparaît dans toutes ses réal­i­sa­tions. D’ailleurs, Rob Rom­bout explique que, dans tous ses films, il fait pass­er une idée qui lui est pro­pre à tra­vers les autres [19]. Comme l’artiste Chris­t­ian Boltan­s­ki, il explique qu’un créa­teur a, en général, une seule idée qu’il décline, qu’il applique à dif­férents sujets.

  • 1. 
    En effet, comme l’explique bien Johanne Lam­oureux « le car­ac­tère indi­ci­aire du procédé pho­tographique voulant qu’en­tre le mod­èle et son image existe néces­saire­ment une rela­tion de con­tiguïté physique. Il en résulte une com­préhen­sion tau­tologique du signe pho­tographique sug­gérant une iden­ti­fi­ca­tion signifiant/signifié » in Johanne Lam­oureux, « La cri­tique post­mod­erne et le mod­èle pho­tographique », Études pho­tographiques, n°1, novem­bre 1996, p. 109–115.
  • 2. 
    Terme de Rob Rombout. 
  • 3. 
    Terme de Rob Rombout. 
  • 4. 
    Élab­o­ra­tion de scé­nari, cast­ing, direc­tion d’acteurs et mise en scène. 
  • 5. 
    Metz (Chris­t­ian), Essais sur la sig­ni­fi­ca­tion au ciné­ma, [t.1 (1968) et t.2 (1972)], Klinck­sieck, Paris, 2003, p.194.
  • 6. 
    ibid. 
  • 7. 
    Radio Bien­v­enue Stras­bourg (RBS).
  • 8. 
    Les films sont pro­jetés et les acteurs com­mentent les images simul­tané­ment. Leurs pro­pos ser­vent de bande son. Il faut not­er que, dans le cas de Moi un noir, les caméras syn­chrones n’existaient pas encore lors du fil­mage. Ceci prou­ve que le com­men­taire extérieur et dom­i­nant a été remis en cause avant la pos­si­bil­ité d’enregistrement syn­chrone des sons. 
  • 9. 
    À la dis­tance tem­porelle s’ajoute, dans ce cas pré­cis, une dis­tance entre l’acteur et son image qui n’agit plus mais com­mente son action. 
  • 10. 
    La tech­nique tech­ni­col­or ren­force la référence aux doc­u­men­taires des années cinquante. 
  • 11. 
    Le ton de la voix off assurée par Pierre Laroche, imi­tant celui des com­men­taires de doc­u­men­taires des années cinquante, insiste plus encore sur son car­ac­tère pater­nal­iste ou de conteur. 
  • 12. 
    Directeur artis­tique : Hugues Maréchal. Piano : Hugues Maréchal. Alto : Sigrid Keunen. Vio­lon : Jean-Pierre Catoul. Vio­lon­celle : Yves Mora. Con­tre­basse : José Bedeur. 
  • 13. 
    Diminu­tif du titre du pro­gramme dynamique des pop­u­la­tions, struc­tures spa­tiales et sociales des pop­u­la­tions de chats sur les îles Ker­gue­len. Les chats ont été intro­duits en 1772 par Ker­gue­len sur l’île éponyme. 
  • 14. 
    Voir Clau­dine de France, Du film ethno­graphique à l’anthropologie filmique. Textes rassem­blés et présen­tés par Clau­dine de France, édi­tions des archives con­tem­po­raines, Brux­elles, Paris, Bâle, 1994. 
  • 15. 
    Cor­re­spond au sec­ond type de plan précédem­ment décrit. 
  • 16. 
    Con­for­mé­ment à la tech­nique de la caméra sub­jec­tive qui est définit dans le dic­tio­n­naire médi­a­tique, réal­isé par l’UQAM (Uni­ver­sité du Québec à Mon­tréal), comme « tech­nique selon laque­lle l’action est filmée en fonc­tion de la posi­tion physique et du point de vue d’un per­son­nage, de l’auteur du film ou d’une bande vidéo ».
  • 17. 
    Dans le sens d’ « être avec » à ne pas con­fon­dre avec l’effet de pro­jec­tion du spec­ta­teur dans d’histoire, c’est- à‑dire d’identification du spec­ta­teur à un per­son­nage présent à l’image, pro­duit dans les fic­tions de type clas­sique sur le mod­èle Hollywoodien. 
  • 18. 
    Séquences d’expérimentation décrites dans ce texte : la séquence con­stru­isant une com­mu­ni­ca­tion fic­tive entre les dif­férents pro­tag­o­nistes dans Les Pas­sagers d’Alsace (2002), la scène sur la place d’un vil­lage dans Les Açores de Madredeus et celle présen­tant le cap­i­taine dans Transat­lan­tique Queen Eliz­a­beth 2 (1992).
  • 19. 
    Comme il a été men­tion­né, dans Perm-mis­sion (1999), par exem­ple, Andrey Osipov livre aux spec­ta­teurs une déf­i­ni­tion du doc­u­men­taire qui cor­re­spond tout à fait à celle de Rob Rombout. 
Extrait d’Ams­ter­dam Sto­ries USA, par Rob Rom­bout et Roger van Eck, 2013