Rob Rombout,
portrait critique
par Jacqueline Aubenas, 1999
Paru dans le Dictionnaire du Documentaire, édité par le CGRI, Communauté Française de Belgique, 1999
On ne peut pas ne pas être frappé par la grande cohérence de la filmographie de Rob Rombout. Cet amstellodamois qui vit et travaille à Bruxelles depuis plus de vingt ans a crée un univers cinématographique reconnaissable et personnel.
« Rob Rombout est un réalisateur fasciné par l’ailleurs et les moyens pour s’y rendre, fasciné aussi par la magie et les mythes que sont les croisières et les express transcontinentaux qui témoignent encore d’une époque où le temps et la durée faisaient partie des plaisirs de circuler. »
Avec ce triptyque (Nord Express, Transatlantique, L’île noire), Rob Rombout va trouver son style et son lieu de cinéaste marin et voyageur, celui d’un réalisateur fasciné par l’ailleurs et les moyens pour s’y rendre, fasciné aussi par la magie et les mythes que sont les croisières et les express transcontinentaux qui témoignent encore d’une époque où le temps et la durée faisaient partie des plaisirs de circuler. Ces trois films appartiennent à la même structure narrative et au même registre esthétique. Ici, c’est sans doute la forme qui induit le fond. Rob Rombout filme ses documentaires avec un « faste fictionnel » : le cadre, la lumière, le sens de la composition sont aux antipodes d’un cinéma du réel qui revendique la caméra portée, les gros plans émotionnels ou les aléas d’un tournage difficile. Tout est pensé, voulu, cadré, rendu beau. La perfection de certains plans de hublot, de coque de navire d’intérieur de wagon leur confère un statut d’image à part entière, qui pourrait être isolée comme une affiche ou une représentation emblématique. Sans vouloir faire de rapprochements trop faciles et pour ne pas être hasardeux, on ne peut s’empêcher de faire référence à l’univers pictural des Pays-Bas avec le travail sur la lumière, les ciels immenses, le sens des paysages et des éléments, le goût des natures mortes.
« Rob Rombout est un des rares cinéastes capables de cadrer un gouvernail, une salle des machines, un tableau de bord sans en faire un plan “bateau” suant l’ennui. »
Rob Rombout est un des rares cinéastes capables de cadrer un gouvernail, une salle des machines, un tableau de bord sans en faire un plan « bateau » suant l’ennui (…). Son dernier travail qu’il co-réalise avec Rogier Van Eck, le plus complexe et le plus ambitieux, Amsterdam via Amsterdam, est encore sous forme de work-in-progress. Les Hollandais des Siècles d’or, le seizième et le dix-septième, marins impénitents et intrépides sont allés pêcher la baleine dans les glaces arctiques ou découvrir des Îles perdues de l’hémisphère sud. Ils ont appelé ces îlots arides Amsterdam. Ce film se propose de suivre la trace des explorateurs de jadis qui ont souvent perdu la vie dans cette recherche d’autres mondes pour élargir le territoire exigu de la mère patrie, multipliant le souvenir de leur ville natale.